
Parmi les chansons d’auteurs francophones il y a des titres que j’aime particulièrement. Chanson pour Marilyn de Claude Nougaro fait partie de ceux-là.
J’aime la voix de Claude Nougaro douce et forte à la fois, les images formidables de ce texte et l’instrumentation de Jacques Datin qui nous font voyager dans l’univers impitoyable d’une star de cinéma telle que Marylin Monroe.
Dans cet article, le but de l’exercice est de faire l’analyse d’une chanson au niveau du texte, de la structure, et de la mélodie pour en apprendre davantage sur ce qu’elle contient et à propos de la manière dont elle est créée par l’artiste.
Découvrons la sans plus attendre.
Chansons d’auteurs francophones : Chanson pour Marilyn de Claude Nougaro
Claude Nougaro, né le 9 septembre 1929 à Toulouse, en France, et mort le 4 mars 2004 à Paris 5e, est un auteur-compositeur-interprète et poète français.
Grand amateur de jazz, de musique latine et africaine, jouant sur la musicalité des mots, il s’est appliqué tout au long de sa carrière, dans un insolite mariage des genres, à unir chanson française, poésie et rythme.
Le titre « Chanson pour Marilyn » fait partie de son deuxième 33 tours 25 cm. Le Cinéma est le titre donné à ce disque initialement paru sans titre en 1962.
Aujourd’hui, nous pouvons retrouver ce titre sur l’album « L’essentiel Studio 1962 – 1985 ».
Vous êtes libre de cliquer sur l’album.
Cette chanson a pour particularité d’être construite avec un refrain intégré aux couplets.
Le refrain intégré aux couplets : C’est soit un mot ou groupe de mots qui forment une accroche, a hook en anglais. Il a pour but de retenir l’attention de l’auditeur. Cela peut être le titre ou une partie du titre de la chanson. Il apparaît dans la plupart des couplets même si le reste du texte de ceux-ci change.
Ici, c’est le nom de Marylin qui revient sans cesse.
On a généralement plus l’habitude des refrains détachés du couplet.
Le refrain détaché du couplet : c’est le cœur névralgique de la chanson, il constitue la raison d’être des autres parties. C’est l’apogée musicale et émotionnelle. Généralement les accords changent pour marquer une différence avec les couplets. Les paroles restent inchangées par contre. Il se répète au moins deux fois dans la chanson.
Le premier couplet
Marilyn, Marilyn Quel est le film, le scénario (A) Qu’il te faut tourner de nouveau (A) Et dans quel néant s’illumine (B) Le néon de ton nom, Marilyn (B)
La structure
On remarque qu’il y a une répétition, une allitération, des consonnes » l « , » r » et » n » qui donnent une musicalité à l’ensemble du texte.
Une allitération, du latin ad (à) et littera (lettre), est une figure de style qui consiste en la répétition d’une ou plusieurs consonnes, par contraste avec l’assonance, qui se base sur la répétition de voyelles, souvent à l’attaque des syllabes accentuées, à l’intérieur d’un même vers ou d’une même phrase.
On peut dire qu’il y a une assonance par une certaine répétition de la voyelle » i » dans le texte.
Après le refrain intégré » Marilyn, Marilyn « , il y a des rimes suivies, dites plates ou encore rimes jumelles.
Les rimes sont suivies quand elles se suivent directement : AABB.
On s’aperçoit également qu’il y a une répétition des mots Marilyn et des mots quel et qu’il. On appelle cette figure de style l’anaphore.
L’anaphore, du grec ancien ἀναφορά / anaphorá, « reprise, rapport », est une figure de style qui consiste à commencer des vers, des phrases ou des ensembles de phrases ou de vers par le même mot ou le même syntagme.
L’anaphore rythme la phrase, souligne un mot, une obsession, provoque un effet musical, communique plus d’énergie au discours ou renforce une affirmation, un plaidoyer, suggère une incantation, une urgence. Syntaxiquement, elle permet de créer un effet de symétrie.
Le sens
J’adore le jeu de mots entre néant et néon. J’imagine Marilyn, projetée, seule, dans un décor de cinéma un peu glauque et désert avec un néon qui a du mal à s’allumer à son nom, alors qu’elle est au même moment dans une foule admirative.
C’est le jeu de sens entre l’ombre et la lumière. Marilyn est sous les feux des projecteurs mais est-ce salutaire pour elle? Nous connaissons sa fin tragique. Qu’il s’agisse d’un suicide par empoisonnement ou d’un assassinat, l’ambiance n’était pas au beau fixe.
Le deuxième couplet
Avais-tu donc le cœur si las (8) Que tu préfères l’au-delà (8) À l’eau si bleue de la piscine (8) Ô Marilyn, Marilyn (8)
Dans le deuxième couplet, nous allons nous attarder sur les pieds ou syllabes.
Une syllabe est un groupe de consonnes et de voyelles qui se prononce d’une seule émission de voix.
On remarque que le nombre de pieds est harmonieux. Il y a 8 pieds pour chaque vers.
Les » e » muets en fin de vers ne sont pas comptabilisés ainsi que les » e » qui précèdent une voyelle. Il n’y a pas d’exemple dans le texte de Nougaro. En voici un : Dans ta ville, on t’aime.
Au niveau des syllabes, il faut respecter un certaine régularité mais la plupart des textes n’ont pas exactement le même nombre de pieds de vers en vers. Il ne faut donc pas être sectaire à ce niveau-là. Le chant et la mélodie s’adaptent. Avoir trop de régularité peut parfois créer un effet trop carré, sans surprise, sans relief.
Chansons d’auteurs francophones : le troisième couplet de Chanson pour Marilyn de Claude Nougaro
Le talent payé à prix d’or La beauté en technicolor Et le soleil californien Non, tout cela ne sert à rien Quand on voit l’envers du décor
J’aime le jeu de mots entre talent et prix d’or. Claude Nougaro, joue entre deux sens pour le mot talent. Le talent en tant que monnaie et le talent qui est une aptitude particulière à faire quelque chose. Elle résulte de l’inné et de l’acquis.
Le double sens est un style d’écriture que j’affectionne particulièrement.
Source Wikipedia :
Le talent (Latin : talentum, du Grec ancien : τάλαντον, talanton = l’étalon) est une unité de masse utilisée à l’époque de la Grande-Grèce et jusque sous l’Empire romain. On parle également de talent en Mésopotamie, un talent y étant équivalent à 30 kg1.
Sa valeur correspondait à la masse d’eau contenue dans un pied cube et pouvait donc varier en fonction de la valeur du pied retenue.
À Athènes, après la réforme de Solon, le talent a un poids légal de 60 mines, soit 25,92 kg d’argent. En unité monétaire, le talent équivaut ainsi à 6 000 drachmes.
Aux temps des empires diadoques, à l’époque hellénistique, un mercenaire était payé pendant son service 1 drachme par jour en moyenne.

Le quatrième couplet
Ça tourne mal, ça tourne court Nos rêves, nos joies, nos amours L’espoir comme un vieux magazine A glissé de tes doigts, Marilyn
J’aime le fait que Claude Nougaro s’adresse personnellement à Marilyn, comme un ami à une amie. Il est dans le regret pour elle et s’inclut avec le » Nos » dans ses envies et moments brisés en plein vol. Nous sommes dans l’empathie.
Il y a également toujours les allusions au milieu du cinéma et à la starification : » Ca tourne « , » magasine « .
Le mot » ça » est utilisé pour parler du cinéma, ce qui est peu flatteur et les » je « , » tu « , » nous « , sont utilisés à propos de Marilyn et lui, ce qui crée une intimité. On est dans une discussion privée à laquelle nous avons le plaisir d’assister.
Au niveau de la musique, on est dans une formation jazz plutôt classique : une contrebasse, une guitare jazz électrique, une batterie, un orgue Hammond et une trompette. L’instrumentation s’harmonise parfaitement avec la voix, mélange de silences et de temps forts.

Le rythme est assez lent, 75 BPM, ce qui donne un effet langoureux.
Chansons d’auteurs francophones : le cinquième et dernier couplet de Chanson pour Marilyn de Claude Nougaro
Nos vies ne sont qu’un bout d’essai Pour qui, pourquoi, Dieu seul le sait Toi qui connaît la fin du film Dis Marilyn, est-ce un baiser Dis Marilyn, est-ce un baiser ?
La chanson se termine en beauté par l’image du baiser que l’on connait tous de Marylin.

C’est la dernière scène de notre drame romantique.
Claude Nougaro s’adresse à elle, une dernière fois, soucieux de savoir si elle a trouvé la paix dans la mort et curieux de savoir si elle sera douce pour lui aussi.
Le mot de la fin
J’essaie de diversifier les analyses dans mes articles « chansons d’auteurs et d’auteures francophones ». J’aurais encore pu développer beaucoup de choses dans cette chanson mais j’essaie de ne pas être assommant.
Pour découvrir d’autres points d’étude, je vous invite à cliquer également sur les liens qui se trouvent sur ma page articles.
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